Avec 32 ans d’expérience de vie industrielle, Philippe le Berre dirige depuis 2 ans TKT Consulting qui, depuis sa création, s’est fixée pour mission de promouvoir des modèles d’affaires circulaires pour répondre aux risques et améliorer la résilience des entreprises industrielles. Philippe est également membre de la communauté Circulab et président de NEOPOLIA, un cluster regroupant 200 entreprises industrielles dans la région des Pays de la Loire.
La notion de résilience, autrefois confinée aux domaines de la physique d’abord, et de l’écologie et de la psychologie ensuite, gagne désormais de plus en plus de terrain dans notre société et dans l’économie dans leur ensemble.
Des perturbations à répétition – qu’elles soient d’ordre sanitaire, social, géopolitique ou encore environnemental – bousculent les chaînes de valeur et amènent de plus en plus d’entreprises à se questionner sur la manière d’assurer la continuité et la pérennité de leur activité.
Les industriels, de part de leur dépendance directe aux matières premières, à la logistique et à la main d’oeuvre qualifiée, sont aux premières loges de ces perturbations.
Aborder stratégiquement la résilience est donc une priorité incontournable pour tout industriel qui veut faire face aux défis actuels et ceux à venir.
Quels défis communs pour nos industries ?
- Les perturbations des chaînes d’approvisionnement : celles-ci sont en effet devenues de plus en plus complexes et interconnectées, et ont rendu les entreprises vulnérables à la moindre défaillance dans ce système. Des événements comme la pandémie de COVID-19, les catastrophes naturelles, et les tensions géopolitiques peuvent à tout moment, comme nous l’avons vu ces dernières années, interrompre voire mettre à l’arrêt complet la production et la distribution de biens.
- Les changements climatiques : ils constituent une menace majeure pour l’industrie. Les phénomènes météorologiques extrêmes amènent les entreprises à repenser leurs modèles d’affaires pour devenir plus durables et résilientes.
- La réglementation de plus en plus stricte : pour n’en citer qu’une, la CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive) adoptée récemment par l’Union européenne marque un tournant décisif dans la manière dont les entreprises doivent aborder la durabilité et la transparence dans leurs rapports – et sur le terrain.
- Les attentes des parties prenantes : Qu’elles proviennent des consommateurs, des investisseurs, des fournisseurs et clients, ces parties prenantes ont toutes les mêmes enjeux en terme de durabilité, et poussent les entreprises à intégrer des pratiques responsables et résilientes.
Comment aborder le sujet de la résilience ?
Chez NEOPOLIA, la résilience a toujours été un sujet collectif central au sein de notre cluster. En effet, le réseau offre une réponse à de nombreuses problématiques rencontrées par nos membres, notamment par le partage d’expériences.
Par exemple, pour les questions de ressources humaines, certains membres se partagent leurs salariés, ou confient des prestations à d’autres membres en période de faible activité. Un exemple de solidarité a été extrêmement important lors de la crise du COVID-19, quand des membres ont collectivement réalisé des protections anti-virus.
En outre, pour les contrats que nous prenons collectivement, nous garantissons à nos clients une solution de secours en cas de défaillance d’une entreprise membre, permettant à une autre de prendre le relais.
En plus de ces pratiques de résilience fondées sur la solidarité, de nouvelles problématiques, comme celles évoquées plus haut, se posent aujourd’hui.
Pour y répondre, nous proposons des séances de découverte à tous les niveaux (Conseil d’Administration, équipes permanentes, et prochainement dans chaque « business cluster » : marine, EMR, aéronautique, mobilité et énergies). L’objectif est de faire émerger des idées collectives pour renforcer la résilience de notre réseau, en s’appuyant sur différents outils et méthodes qui ont fait ses preuves, dont la méthode Circulab.
Il convient également de mentionner qu’un groupe RSE a été constitué au sein du Conseil d’Administration, piloté par deux administrateurs. Ce groupe doit rendre compte des avancées chaque trimestre. C’est de ce groupe qu’est née l’idée d’octroyer un « passeport environnemental » à chaque membre ayant participé à un certain nombre d’ateliers. Ce passeport permet à son titulaire de répondre aux exigences de la CSRD imposées par les donneurs d’ordre.
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Intensification de l’usage des machines-outils : un exemple d’économie de l’usage
À partir de discussions avec plusieurs chefs d’entreprise, il a été constaté que le parc machines existant pourrait être mieux valorisé en intensifiant son utilisation. C’est sur cette base que nous avons imaginé le projet d’intensification de l’utilisation des outils industriels existants dans les Pays de la Loire.
Ce projet, qui s’appuie sur l’économie de l’usage, un des axes de l’économie circulaire, vise à renforcer la résilience de l’écosystème régional en développant :
- Des économies de ressources, en limitant les investissements dans de nouveaux équipements, en générant des économies sur la gestion des pièces détachées, ou encore en privilégiant les solutions locales.
- De nouveaux business, via des prestations additionnelles telles que la mutualisation de l’outillage, la location de matériel, le prêt de ressources humaines, etc.
- Des innovations organisationnelles, en diversifiant l’utilisation initiale des outils pour d’autres usages et en coordonnant la capacité de charge à l’échelle régionale.
- Des innovations techniques, et notamment l’utilisation du scan 3D et développement de l’impression 3D pour la fabrication additive de pièces détachées destinées à la maintenance des équipements.
- Des innovations en maintenance, dont l’exploration de la Maintenance en Conditions Opérationnelles (MCO) avec la mise en place d’une task force dédiée.
- Des innovations juridiques et assurantielles par l’encadrement du prêt de personnel avec ou sans but lucratif, la redéfinition des règles des échanges économiques, et l’assurance collective liée à l’usage mutualisé des machines.
- Le renforcement des relations entre le milieu académique et industriel avec la formation de techniciens spécialisés en maintenance industrielle, la mutualisation de l’utilisation des outils entre entreprises et établissements de formation. Ce projet pourra également promouvoir les formations aux métiers stratégiques pour les industries.
Ce projet doit démarrer au 4e trimestre 2024, pour être déployé en 2025 et 2026. Nous imaginons d’ores et déjà la création d’une entreprise de pièces détachées, dotée de capacités de rétro-ingénierie, pour supporter et renforcer le projet.
Vous êtes un industriel et vous voulez savoir plus sur le sujet ? Parlons-en.