Les défis de la vente en gros après la Covid-19

Article proposé par le Réseau Vrac, l’association interprofessionnelle pour le développement du commerce sans emballages.

Quel avenir pour le secteur des ventes en vrac1 ?

3 ans après la pandémie de COVID-19, qui a accéléré des changements dans les habitudes de consommation et dans un contexte d’inflation qui pousse les consommateurs à des arbitrages dans leurs achats, quel avenir se dessine pour la filière de la vente en vrac ?

Présent quasiment exclusivement dans les rayons des magasins bio avant 2016, le vrac est désormais distribué dans plus de 10 000 points de vente sur le territoire français. La France est chef de file en Europe au niveau du développement et du déploiement de la vente en vrac, avec plus de 960 épiceries spécialisées et 70% des grandes et moyennes surfaces (GMS) qui possèdent un rayon vrac. La vente en vrac peut concerner des produits alimentaires ou non alimentaires, et être solide ou liquide. Ainsi, ce sont plus de 10 familles de produits qui sont disponibles en vrac, allant de l’épicerie salée/ sucrée aux cosmétiques et produits d’entretien, en passant par l’animalerie et la jardinerie.

En termes de consommateurs, 31% des ménages français déclarent avoir acheté en vrac en 2021, et 45% achètent en vrac au moins une fois par mois2. Cela signifie que 4 millions de ménages français sont des consommateurs réguliers de produits en vrac.

En pleine expansion jusqu’en 2020, la filière se trouve aujourd’hui bousculée par les crises successives. Pourtant, le vrac se présente comme une solution optimale pour maîtriser son budget tout en limitant sa consommation d’emballages à usage unique et le gaspillage alimentaire.

Décryptage des défis à relever pour cette jeune filière qui fait preuve de résilience et continue à s’engager pour proposer une offre de produits responsables au plus grand nombre.

1Lavente en vracest définie comme « la vente au consommateur de produits présentés sans emballage, dans des quantités choisies par le consommateur, dans des contenants réemployables ou réutilisables ».
2 Etude Nielsen 2021 pour Réseau Vrac

Définition : La vente en vrac est définie comme « la vente au consommateur de produits présentés sans emballage, en quantité choisie par le consommateur, dans des contenants réemployables ou réutilisables ».

photo magasin vrac

1. Un contexte polycrises qui impacte la filière vrac

Représentant moins de 15 millions d’euros en 2015, le marché du vrac a explosé pour atteindre en 2019 une valeur de 1,2 milliard d’euros. En parallèle, le nombre d’ouvertures de commerces spécialisés a connu un boom, avec plus de 300 nouveaux commerces vrac en vrac en 2020, l’année de la crise sanitaire.

Néanmoins, les confinements successifs ont vu certaines habitudes des consommateurs changer (davantage d’achats en ligne, moins de trajets domicile-travail…) et impacter négativement la filière, notamment à partir de mai 2021 (fin du 3ème confinements, réouverture des bars et restaurants après 8 mois de fermeture). La fréquentation des commerces vrac a commencé à chuter à partir de cette période et de nombreux commerces ont dû fermer leurs portes. Comme l’explique :

Celia Rennesson, Directrice Générale de l’association Réseau Vrac (Réseau sans emballage) :

« Nous devons nous mettre dans la tête du consommateur. Pendant le lockdown, le seul plaisir autorisé était de faire les courses. Après, les citoyens français ont préféré se concentrer sur d’autres choses. On est dans un contexte anxiogène où ils ont l’impression de ne plus avoir le temps.« 3

Un contexte d’inflation dans lequel s’inscrit le secteur du vrac et plus généralement de la distribution

En 2022, le marché du vrac est en recul et retrouve son niveau de 2018, à savoir 850 millions d’euros environ. En plus des repères bouleversés par la crise sanitaire, l’inflation touche le pays et vient contraindre économiquement les foyers qui doivent effectuer des arbitrages de consommation, parfois au détriment du panier de course.

Les difficultés du secteur des ventes en vrac s’inscrivent dans une tendance plus globale de diminution de la fréquentation physique dans le secteur du commerce de détail : en janvier 2022, la fréquentation des magasins avait diminué de 28% par rapport à janvier 2019 4. Cela a également un impact sur le secteur biologique, où les ventes ont diminué de 6,3% entre janvier et septembre 2022 5, et où plus de 165 magasins biologiques ont fermé cette année 6 .

3 Propos de  » Parole d’expert,  » En choisissant la quantité, on maîtrise son budget  » dans Le Parisien, 21 décembre 2022
4 Chiffres tirés de  » Commerce : baisse de fréquentation durable dans les magasins  » de Philippe Bertrand dans Les Echos Entrepreneurs, 5 février 2022
5 Chiffres issus de la Fédération Nationale d’Agriculture Biologique (FNAB)
6 Chiffres issus de  » Regards d’experts : les ouvertures et fermetures de magasins bio à la loupe  » de Fabien Foulon, Biolinéaires, 23 octobre 2022
épicerie vrac

2. La filière vrac comme solution de demain

Malgré ce contexte économique défavorable, le marché montre des signes de reprise, avec un retour progressif de la clientèle en magasin. Le vrac reste plus que jamais, une filière d’avenir, en cela qu’elle détient beaucoup d’atouts pour faire face à la crise du pouvoir d’achat et au changement climatique.

Un contexte réglementaire défavorable

L’Etat français soutient la vente en vrac avec les lois « Anti gaspillage alimentaire pour une économie circulaire » en 2020 et « Climat et résilience « en 2021. La première permet de définir officiellement la vente en vrac dans la loi (une première mondiale) et prévoit la possibilité pour le consommateur d’être servi dans son propre contenant. La seconde prévoit dans son article 11 que les magasins de plus de 400m2 devront consacrer au moins 20% de leur surface aux produits vendus en vrac avant le 1er janvier 2030, ce qui encourage le développement de l’offre.

En Italie, le ministre italien de la transition écologique a publié en octobre 2021 un décret qui prévoit une aide de 5000€ pour développer le vrac dans les commerces. Cette subvention peut être demandée soit par les commerçants qui souhaitent ouvrir un rayon vrac, soit par les particuliers qui souhaitent ouvrir un magasin spécialisé dans le vrac. Le montant total investi par le gouvernement italien est fixé à 20 millions d’euros chaque année.

Des professionnels qui innovent pour répondre aux freins de la consommation vrac

Actuellement, les principaux obstacles à l’achat en gros mentionnés par le consommateur sont le prix pour 37%, suivi par l’hygiène (29%), ainsi que la praticité et le manque d’information sur les produits (28%) 8 .

Pourtant, les professionnels du vrac ne manquent pas de ressources et de créativité pour rendre le vrac plus attractif et lever ces freins.

C’est le cas, par exemple, des meubles de distribution qui permettent de délivrer des produits plus complexe, comme Jean Bouteille ou Cozie avec du vrac liquide ou cosmétique. Il y a aussi des progrès sur le développement de contenants réutilisables pour le consommateur, avec FillGood par exemple, qui propose des poches réutilisables à fermeture zip et un service grâce  à un bec doseur. Pour répondre à la demande d’information sur les produits et sur leur  traçabilité, des applications mobiles telles que Vracoop ou Packtic ont été développées sur la base de l’utilisation de codes QR.

Depuis 2016, c’est plus de 13 millions d’euros qui ont été investis dans la recherche et développement dans la filière vrac.

De par sa nature et sa philosophie, en tout point différentes du modèle préemballé, le vrac présente un formidable terrain d’innovation pour les professionnels et une opportunité de faire partie des pionniers d’un nouvel imaginaire.

Le vrac , une des solutions à la crise de environnementale et du pouvoir d’achat

Enfin, la consommation vrac offre des réponses évidentes aux enjeux actuels :

  • Le vrac permet de faire des économies en choisissant la juste quantité : en consommant vrac, on paye au gramme près car aucune quantité n’est imposée, et permet donc de maîtriser le pouvoir d’achat (pas besoin de devoir choisir d’acheter tel produit plutôt qu’un autre : par les petites quantités il reste possible d’acheter un peu de tout grâce au vrac).
  • Dans un contexte de raréfaction des matières premières pour la confection des emballages, le vrac s’avère être une solution intéressante avec le réemploi des contenants des consommateurs.
  • Le vrac a aussi de multiples bénéfices environnementaux : il permet non seulement la réduction des déchets mais aussi celle des émissions en CO2 et de la consommation d’eau, ce qui participe à la préservation des ressources et de notre planète.En effet, chaque année, 29 kg de nourriture par personne sont jetés, dont 7 kg sont encore emballés.
  • Il permet également de réduire jusqu’à 95 % les emballages destinés aux consommateurs et de diminuer les émissions de CO2 jusqu’à 48 %9 ..
7 Respectivement promulguées le 10 février 2020 et 22 août 2021
8 PanelViews, décembre 2019 Nielsen pour Réseau Vrac
9Numérostirés de  » Le plastique, ça n’emballe plus ? « 2020, WWF
épicerie OBocal_©MasayoOgin

Pour conclure

Ainsi, malgré un contexte économique post-Covid-19 marqué par la baisse du pouvoir d’achat et un changement d’habitudes de consommation, le vrac reste une filière d’avenir innovante, qui propose à la fois des solutions pour faire des économies tout en réduisant son impact sur l’environnement.

Pour les entreprises, il s’agit d’un nouveau secteur très vaste qui offre de nombreuses possibilités de repenser l’expérience dans les magasins, de raconter des histoires autour des produits et de valoriser la qualité des produits.

C’est pour faire connaître tous ces bénéfices et rappeler à quel point le vrac est inscrit dans l’avenir que Réseau Vrac a lancé sa deuxième édition du « Mois du Vrac » pendant tout le mois de mars (31 jours pour (re)découvrir le vrac). Tous les professionnels (marques ou distributeurs) qui proposent du vrac sont invités à organiser des événements pendant cette période et à promouvoir leur rayon vrac. Toutes les informations (uniquement en français pour le moment) : ici

Chloé Liard et Lucie Gervais, du Réseau sans emballage.

Maintenant, c'est à vous.

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