Comment comprendre et combattre la surconsommation des ressources en eau

L’eau est la source de la vie. Les premiers micro-organismes sont apparus dans l’océan il y a plus de 4 milliards d’années, et depuis lors, ils ont évolué, se sont multipliés et ont colonisé notre planète. Aujourd’hui, tous les écosystèmes et toutes les espèces vivantes ont besoin d’eau pour survivre. Les êtres humains, aujourd’hui plus que jamais, ont besoin d’eau pour boire, manger, cultiver nos cultures, construire nos maisons, produire nos vêtements, nos voitures, nos smartphones, nos ordinateurs ; rien ne serait possible sans eau douce.

Notre planète est appelée la "planète bleue" car 71% de la surface de la Terre est constituée d’eau, ce qui donne l’impression que nous ne manquons pas de cette ressource. Mais 97,5% de cette eau est de l’eau salée contenue dans les mers et les océans. Seuls 2,5% sont des eaux douces, dont seulement 30% sont des eaux souterraines. La majorité est retenue dans les glaciers, le permafrost et l’atmosphère, ce qui la rend inutilisable. En outre, moins de 1 % de l’eau de la planète est à la fois douce et liquide.

D’ici à 2050, nos besoins en eau devraient augmenter de 55 % en raison de la croissance démographique et de la consommation de masse.. Le risque de pénurie augmente car les réserves d’eau douce sont limitées et surexploitées, plus de 80% des réserves d’eau douce étant déjà prélevées chaque année. La surconsommation d’eau douce entraîne de nombreux problèmes : inégalités sociales, perte de biodiversité, dégradation des écosystèmes, contamination des eaux…

L’eau est au cœur des défis du XXIe siècle, étant étroitement liée au réchauffement climatique, à la sécurité alimentaire, à l’énergie, à la santé et à l’égalité. Présentés lors de la Semaine mondiale de l’eau en août dernier, deux nouveaux rapports de la FAO, l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, ont alerté sur l’urgence d’une utilisation plus économe et responsable de l’eau. Cet article vise à présenter les causes de la pression sur la ressource, les risques et les alternatives à ce modèle de surconsommation qui doivent être mises en place.

Dans de nombreux villages africains, l’eau est un luxe, et les habitants parcourent chaque jour plusieurs kilomètres pour s’en procurer.

Quelles sont les pressions exercées sur les ressources en eau et les risques associés ?

Nos industries sont grandes consommatrices d’eau. À l’échelle mondiale, environ 19 % de l’eau douce est consommée à des fins industrielles, souvent avec des inefficacités élevées, ce qui entraîne une surextraction et, à son tour, la dégradation des écosystèmes. En outre, notre système agricole est particulièrement dommageable pour les sources d’eau, puisqu’il représente 70 % des prélèvements d’eau douce dans le monde. Les pesticides libérés dans les champs et les ingrédients chimiques nécessaires dans les usines polluent les sources d’eau et accélèrent la destruction des écosystèmes.

Un aquifère souterrain sur cinq, source d’eau potable pour la moitié de la population mondiale, est surexploité. Les prélèvements excessifs accentuent les risques de glissements de terrain et favorisent la pénétration du sel, rendant à terme l’eau imbuvable. Avec l’élévation du niveau de la mer, la qualité de l’eau douce contenue dans les aquifères est menacée dans des grandes villes comme Shanghai, en Chine, et Dhaka, au Bangladesh.

D’un point de vue social, l’eau est devenue un facteur d’inégalité car elle est privatisée, polluée et donc rendue inaccessible. La distribution inégale se produit à l’intérieur des pays et entre les pays : 9 pays concentrent 60% de l’eau douce mondiale. L’accès à l’eau est un problème majeur. Le rapport de la FAO souligne qu’une personne sur trois vit dans des pays en situation de stress hydrique, c’est-à-dire des pays qui ne disposent pas " d’une eau efficace, propre et abordable pour les moyens de subsistance, la santé publique et l’industrie " , selon la définition du World Resources Institute. Le manque d’eau douce est la principale cause de maladie, a des répercussions économiques au niveau des États et est au cœur de nombreuses inégalités économiques et sociales. L’eau douce est essentielle pour réduire la pauvreté et produire de la nourriture et de l’énergie.

Si les niveaux actuels de consommation et de pollution se maintiennent, au mieux, 50 % de la population mondiale vivra dans des zones de stress hydrique d’ici 2050, au pire, 55 % d’ici 2030 selon Options for Decoupling Economic Growth from Water Use and Water Pollution, 2016, UN Environment Program & International Resource Panel.

Quelles sont les initiatives actuelles et potentielles pour régénérer les ressources en eau ?

L’eau douce est essentielle à la vie sur terre et à notre civilisation, toutes deux aujourd’hui menacées. Pour inverser cette menace existentielle croissante, nous devons préserver et distribuer l’eau douce de manière équitable, ce qui signifie que les gouvernements, les communautés et les entreprises doivent de toute urgence modifier leur vision et leur utilisation de l’eau.

Les gouvernements doivent mettre en place des installations et des infrastructures efficaces, pour distribuer l’eau douce, récupérer les eaux usées et réutiliser les eaux grises. La réutilisation des eaux usées varie considérablement d’un pays à l’autre. En 2020, la Grèce, l’Italie et l’Espagne réutilisaient entre 5 et 12 % de leurs eaux usées. D’autres pays, comme Singapour ou la Namibie, réutilisent 100 % des eaux usées (source : EU Water Reuse Blueprint). Dans le cadre du plan d’action pour l’économie circulaire adopté en 2020, la Commission européenne a annoncé qu’elle faciliterait la réutilisation et l’efficacité de l’eau dans de nombreux secteurs, grâce à des initiatives comme la nouvelle réglementation européenne sur la réutilisation de l’eau agricole, qui entrera en vigueur à partir du 26 juin 2023. L’UE s’est également fixé pour objectif de réutiliser 6 fois plus d’eaux usées d’ici 2025. Un objectif ambitieux, mais pas inatteignable, car les eaux usées peuvent être récupérées à partir de diverses sources (agriculture et irrigation, processus industriels, services publics d’eau souterraine, reconstitution des nappes phréatiques et restauration de l’environnement).

Ménages niveau

Les préoccupations concernant l’utilisation de l’eau à des fins domestiques ont augmenté ces dernières années. Tout d’abord, la sensibilisation du public est nécessaire pour changer les comportements, car la consommation dans les pays développés est loin d’être modérée. En moyenne, un habitant d’Amérique du Nord utilise 250 litres d’eau par jour, alors qu’un habitant d’Afrique subsaharienne en utilise moins de 10 (selon une étude du magazine français Courrier International, édition spéciale, sept-oct 2020). Les Français passent en moyenne 9 minutes sous la douche, chaque minute se traduisant par 15 à 20 litres d’eau douce consommés.

Pour réduire la consommation domestique, les citoyens devraient : prendre des douches plutôt que des bains, réduire le temps passé sous la douche, éviter de faire la vaisselle sous le robinet mais utiliser une cuvette ou un évier, récupérer l’eau de pluie pour le jardinage, acheter des produits d’occasion et des produits de bricolage fabriqués localement, car ils permettent de réduire la consommation d’eau dans les usines.Préserver l’eau douce, c’est aussi utiliser des produits de nettoyage biodégradables et éviter la pollution chimique des toilettes, des douches, des lave-linge et des canalisations.

Niveau industriel

Notre système agricole doit être repensé – les cultures, les intrants et la saisonnalité doivent être restructurés pour créer un système plus sobre. Nous devrions cultiver des plantes qui épuisent moins les ressources (comme le riz ou le maïs), éviter la monoculture qui provoque épuisement, ruissellement, érosion, etc…., et diminuer la consommation d’engrais chimiques. Leur utilisation assèche les terres, qui deviennent beaucoup plus gourmandes en eau à cultiver. Des systèmes plus sobres et résilients existent, comme l’agroforesterie ou l’agroécologie. L’utilisation d’engrais biologiques, la rotation des cultures et le choix d’espèces végétales adaptées aux conditions climatiques et pédologiques de la région permettent de réduire la consommation d’eau. En effet, avec la diversification des cultures, chaque culture bénéficie de manière pérenne des services rendus par les autres. L’agriculture doit également penser à utiliser les eaux usées traitées sans contaminer la ressource ni l’environnement.

Dans l’industrie, l’économie circulaire peut être une réponse à la surconsommation. L’eau étant nécessaire à l’extraction des matières premières et à la production des biens, la réutilisation, la réparation et la refabrication permettraient de réduire considérablement la consommation. Au Chili, la Direction Générale de l’Eau a calculé la consommation par type d’activité : en 2007, 66% était utilisée pour l’exploitation minière, 14,3% pour l’agriculture et 4,4% pour la boisson. En 2032, la DGE estime que 72% seront utilisés pour l’exploitation minière, 8,9% pour l’agriculture et 3,4% pour l’eau potable. La réduction de la consommation de masse de biens entraînerait une baisse de la demande de matières premières, ce qui permettrait au Chili de mieux gérer son approvisionnement en eau potable.

Dans le cadre des processus industriels, les pénuries d’eau douce ont un fort impact sur l’industrie, créant de grandes inquiétudes pour toutes les parties concernées. En augmentant la demande et en réduisant ainsi la disponibilité de l’eau, les acteurs industriels ont donné lieu à des questions de sécurité d’approvisionnement. Certaines entreprises, comme Aquassay, se sont spécialisées dans l’optimisation de l’efficacité de l’eau au niveau industriel afin de s’attaquer à ce problème. Leur mission est d’optimiser les performances environnementales et de production des industries ainsi que l’utilisation et le traitement de l’eau dans les villes. L’eau sur les sites de production fait partie d’un système complexe, car elle est liée à tous les processus de production et de fabrication (réchauffer, refroidir, diluer, transporter, cuire, comme ingrédient, comme intrant, etc.) Pour y faire face, Aquassay a développé une offre SaaS qui permet d’évaluer l’efficacité de l’eau sur site, d’identifier les zones de risque et les améliorations potentielles, d’élaborer et de mettre en œuvre des stratégies d’efficacité de l’eau.

Merci à Joanna Henderson, fondatrice de Blue Dot et membre de Circulab Community, et à Stéphane Gilbert, Aquassay, pour toutes les informations qu’ils ont partagées avec nous.

Maintenant, c'est à vous.

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